VEILLE N°53

Les titres de la presse 

du 15 avril au 01 mai 2024


Rédacteurs : Amzina Daoussa Deby, Emilie Krezdorn, Josué Nuss-Schildknecht, Sephora Zidoud, Yaëlle Rouault, Inès Le Riche, Melwan Elakad. 
 


International


1. Les avions de combat ukrainiens « utilisent des iPad » pour contrôler les armes occidentales


    William LaPlante, sous-secrétaire d'État américain à la défense pour l'approvisionnement et le soutien logistique aux armées (Under Secretary of Defense for Acquisition and Sustainment) a affirmé que l'armée de l'air ukrainienne utilisait des tablettes, notamment des iPad, dans le maniement des armes occidentales dans sa guerre contre la Russie. Les pilotes ukrainiens d'avions de chasse soviétiques tel que le Soukhoï Su-27 (Code OTAN Flanker) ou le Mikoyan-Gourevitch MiG-29 (Code OTAN Fulcrum) utilisent notamment ces tablettes pour le guidage des missiles air-sol achetés auprès des armateurs américains et européens. 

    Parmi les types de projectiles téléguidés via les fonctionnalités GPS de l'iPad se trouvent des missiles AGM-88 "HARM" conçu pour détruire les systèmes de défense antiaérienne guidés par radar, des bombes JDAM pour "Joint Direct Attack Munition" fournies par Boeing, et les bombes guidées AASM pour "armement air-sol modulaire" de conception française. Une vidéo de l'armée de l'air ukrainienne montrant l'utilisation par un pilote de Su-27 d'une tablette tactile est par ailleurs venue corroborer les dires du sous-secrétaire d'État américain.


2. Les forces spéciales américaines ne sont plus les bienvenues au Tchad


    Si les États-Unis ont dû se résoudre à retirer leurs forces du Niger, faisant ainsi une croix sur la base aérienne 201 d’Agadez, ils ne peuvent aujourd’hui plus compter sur le Tchad pour maintenir une présence militaire au Sahel. 

    Dans un courrier daté du 4 avril et signé par le général Amine Ahmed Idriss, le chef d’état-major de la force aérienne tchadienne, les États-Unis ont été appelés à cesser « immédiatement » leurs activités militaires sur la base aérienne « Sergent chef Adji Kosseï », accusés de ne pas avoir fourni les documents justifiant la présence de leurs forces sur place. 

    À la tête de l’US AFRICOM, le commandement militaire américain pour l’Afrique, le général Michael Langley avait pourtant rencontré en janvier dernier le général Abakar Abdelkerim Daoud, le chef d’état-major des forces armées tchadiennes, pour évoquer les « défis sécuritaires régionaux et les efforts du Tchad pour lutter contre l’extrémisme violent au Sahel ». 

    Néanmoins, le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder, a dû confirmer ce 26 avril le départ de N’Djamena des forces spéciales américaines, soit près de 75 opérateurs. Contraints de se « repositionner » en dehors du Tchad « dans le cadre d’un réexamen des modalités de la coopération sécuritaire » avec les autorités tchadiennes, cet examen ne reprendra qu’après l’élection présidentielle du 6 mai pour laquelle Mahamat Idriss Déby, actuellement président du « Conseil militaire de transition », est candidat. 

    Ce changement de ton des autorités tchadiennes à l’égard des États-Unis annonce peut-être un revirement d’alliance, alors que M. Déby avançait récemment vouloir renforcer la coopération militaire avec la Russie, qu’il qualifiait de « pays frère ». C'est aussi un moyen pour N’Djamena de faire monter les enchères, le Tchad étant le dernier allié des Occidentaux au Sahel.


3. La France confirme sa volonté de créer une force de réaction rapide européenne 2025


    Dans son dernier discours sur l’Europe prononcé le 25 avril dernier à la Sorbonne, Emmanuel Macron avait avancé trois nouvelles propositions concernant la défense. 

    Macron a tout d’abord fait part de son intention d’inviter les pays membres de l’Union Européenne à bâtir une « initiative européenne de la défense ». Cette proposition intervient après avoir souhaité le lancement d’une initiative européenne d’intervention en 2017 et doit permettre l'élaboration d'un concept stratégique pour que l'initiative européenne aboutisse à des capacités pertinentes. Le président français parle ici de la défense aérienne et de « tirs dans la profondeur ». 

    La seconde annonce reprend l’idée évoquée par la cheffe de gouvernement estonien, Kaja Kallas, d’un « emprunt européen » pour renforcer les capacités industrielles de l’Union européenne. 

    Enfin, la troisième proposition consisterait à créer une « Académie militaire européenne », afin de « former les futurs cadres militaires et civils européens aux enjeux de sécurité et de défense ». En effet, en 2017, Emmanuel Macron avait avancé l’idée d’une « académie européenne du renseignement », laquelle s’était concrétisée avec le très discret « Collège du renseignement en Europe » qui a vu le jour en 2019. 

    Certaines propositions d'Emmanuel Macron sont par ailleurs sur le point de se concrétiser comme par exemple celle de la « capacité européenne de cybersécurité et de cyberdéfense » pour laquelle l’Union européenne a déjà une stratégie élaborée. « Il nous faut aussi nous presser dans la mise en œuvre de la Boussole stratégique […], et tout particulièrement mettre en place une force de réaction rapide pour pouvoir déployer rapidement jusqu’à 5000 militaires dans des environnements hostiles d’ici à 2025, en particulier, pour venir en aide à nos ressortissants », a par ailleurs affirmé Macron. 

    Sébastien Lecornu, ministre des Armées, estime pour sa part que la création d’une force de réaction rapide européenne est « un sujet clé [sur] lequel je souhaite qu’on puisse aboutir dès l’année prochaine, en étant très réactif et très rapide », en revenant sur les propos du président.


4. Emmanuel Macron prêt à « ouvrir le débat » d’une défense européenne comprenant l’arme nucléaire

    Emmanuel Macron, après avoir voulu rappeler l’importance de sa politique européenne lors de son discours de la Sorbonne le 25 avril, semble vouloir aller encore plus loin en relançant le vieux serpent de mer de l’Europe de la défense. 

    Dans une interview donnée le 26 avril dernier, le président de la République a en effet ouvert la porte à l’élaboration d’une conception européenne de la doctrine de dissuasion nucléaire. Souhaitant « ouvrir ce débat », qui inclurait la défense antimissiles européenne et les armes de longue portée, Macron propose de « [mettre] tout sur la table, et [regarder] ce qui nous protège véritablement de manière crédible », notamment face à la Russie.

    Alors que le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne a fait de la France le dernier État membre à être doté de ses propres armes nucléaires, le chef de l’État propose d’associer à cette stratégie les États accueillant des armes nucléaires américaines sur leur sol, soit la Belgique, les Pays-Bas, l’Allemagne et l’Italie. Cette éventualité devra pourtant être conciliée avec le statut autonome de la doctrine et de l’arsenal nucléaire français au sein de l’OTAN, qu’Emmanuel Macron assure vouloir préserver. 

    Ces déclarations sont dans la continuité de celles de son discours à l’École de guerre du 7 février 2020, où il avançait que « les intérêts vitaux de la France ont désormais une dimension européenne », l’atteinte à ces intérêts vitaux étant l’une des conditions d’emploi des armes nucléaires. Reste que cette notion demeure floue, une ambiguïté assumée par le président de la république pour qui « la doctrine française est qu’on peut utiliser [les armes nucléaires] quand nos intérêts vitaux sont menacés. J’ai déjà dit qu’il y a une dimension européenne dans ces intérêts vitaux, sans les détailler car cette dissuasion concourait à la crédibilité de la défense européenne », l’ambiguïté stratégique étant par ailleurs un élément de la doctrine de dissuasion. 

    Si ces efforts déployés pour relancer une Europe de la défense surviennent sur fond de doutes quant à la nature du soutien américain et à la possibilité d’un retour de Donald Trump à la Maison Blanche menaçant de quitter l’OTAN, l'optique d'une politique européenne de la défense prendra toujours place aux côtés de l’OTAN, selon le président de la République.

 

Politique de défense

 

5. Un rapport affirme que la France souhaiterait utiliser un système de défense aérienne grec pour les Jeux Olympiques

    La France a sollicité le système de défense aérienne grec pour la durée des Jeux Olympiques de Paris, selon le quotidien grec Kathimerini. L'autorité française a formulé une demande de transfert du système de missile sol-air à courte portée Crotale de l'armée de l'air grecque, indique le journal. Les pourparlers ont débuté au niveau diplomatique en novembre dernier, mais semblent n'avoir abouti à aucun développement jusqu'à présent. 

    La raison invoquée par la France est son intention de fournir des systèmes anti-aériens à l'Ukraine, nécessitant ainsi une assistance alliée pour assurer la défense aérienne des infrastructures critiques à Paris lors des Jeux Olympiques, selon Kathimerini qui cite plusieurs sources. Le porte-parole du gouvernement, Pavlos Marinakis, a par ailleurs déclaré lors d'un point de presse régulier que si les alliés demandent une assistance spécifique pour une période déterminée, cela sera fait après coordination et consultation entre les deux parties. 

    C'est la première fois qu'un rapport évoque une demande de la France concernant du matériel de défense aérienne pour les Jeux Olympiques. Jusqu'à présent, il était rapporté que des forces de police et militaires étrangères seraient présentes lors des Jeux. Bien que non directement liée à l'Ukraine, la demande française est perçue comme un moyen indirect d'inciter Athènes à "débloquer" une partie de sa défense aérienne dans l'effort général européen pour renforcer Kiev. 

    Le système de défense aérienne Crotale en question, construit par la France et intégré à l'armée de l'air grecque en 2003, est décrit comme "idéal" pour combler aux objectifs recherchés par la France. Selon un rapport publié par le Financial Times plus tôt cette semaine, les dirigeants européens ont personnellement exhorté le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis et son homologue espagnol Pedro Sánchez lors d'un sommet à Bruxelles à fournir des systèmes de défense aérienne à l'Ukraine.

 

6. Le MGCS, ce char du futur qui scelle la coopération militaire entre Paris et Berlin

    Le ministre français de la Défense Sébastien Lecornu et son homologue Boris Pistorius ont signé un accord à Paris le vendredi 26 avril 2024. Permettant de remettre au goût du jour la coopération franco-allemande, le projet de cette entente industrielle d'une valeur de plusieurs milliards d'euros devrait aboutir à la construction de véhicules blindés. 

    « L’équipement militaire révolutionnaire » qu’évoque Sébastien Lecornu réside dans le MGCS ou Système de combat terrestre principal. Il s’agit d’un programme qui aspire à créer un nouveau type de char de combat pour les forces armées. D'ici 2040, il se substituera aux Leclerc français et Leopard allemand. Ce véhicule comprendra plusieurs composantes et technologies avancées de sorte qu'il sera connecté à des satellites pour un partage de données avec les armées. L’objectif s’avère ainsi de moderniser les capacités militaires terrestres en intégrant différentes innovations et fonctionnalités.

    Initialement bloqué en raison des conflits industriels et militaires sur la question de transition énergétique entre autres, le projet du char du futur semble désormais en bonne voie. Il aura ainsi fallu sept ans de négociations pour que les deux États s’accordent pour une répartition à parts égales, entre Nexter et l’allemand KMW notamment.

 

7. Selon la Cour des comptes, le ministère des Armées est celui qui a perdu le plus de postes en 2023

    Dans son rapport le plus récent sur le budget de l’État en 2023, la Cour des comptes a identifié diverses anomalies dans la gestion des crédits du ministère des Armées, ce qui a grandement entaché la transparence du ministère envers le Parlement. En effet, 2 milliards d’euros d’autorisations d’engagement du programme 178 « Préparation et emploi des forces » ont été reportés à l’exercice 2024 pour difficultés de préparation dès 2022, ce qui représente 7,4 % des ressources budgétaires de la loi de finances initiale. 

    De plus, il y a eu une entorse au principe d’annualité des crédits avec le gel et le report de crédits, notamment ceux destinés au fond spécial pour l’équipement de l’Ukraine de l'ordre de 200 millions d'euros. Ce fond avait été adopté par la loi de finances rectificative pour 2022 puis par la loi de finances de fin de gestion pour 2023, et a finalement été reporté aux exercices 2023 et 2024, au lieu d'être voté lors de l'adoption des lois de finances initiales pour ces derniers. Cela constitue, pour la Cour des comptes, une autre entorse au principe d’annualité des crédits. 

    Par ailleurs, la loi de finances de fin de gestion pour 2023, qui a ouvert 2,6 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et 2,3 milliards d’euros de crédits de paiement, aurait permis de couvrir des « dépenses nouvelles à hauteur de 3,3 milliards d’autorisations d’engagement et de 3 milliards de crédits de paiement ». Parmi ces nouvelles dépenses, la Cour des comptes a noté les surcoûts liés au soutien à l’Ukraine, aux opérations extérieures et aux carburants opérationnels, qui aurait compliqué l’exécution budgétaire. 

    En outre, l'allocation de fonds supplémentaires de 1,5 milliards pour la mission Défense dans le cadre de la Loi de programmation militaire 2024-2030 a contribué à contraindre l'exécution budgétaire. Ces pratiques ont réduit l'information du Parlement, limitant ainsi la communication de certains indicateurs budgétaires. En effet, le rapport déplore le fait que plusieurs indicateurs budgétaires – comme les reports de charge ou les restes à payer – ne soient plus communiqués aux parlementaires rendant leurs missions de contrôle plus ardues. Il en va de même pour les indicateurs mesurant l’activité opérationnelle qui sont confidentiels, réduisant « significativement l’intérêt de la partie performance » des « publications budgétaires pour le Parlement » selon la Cour des comptes. 

    Enfin, le rapport a souligné une anomalie concernant les effectifs du ministère des Armées : s'il devait créer 1547 postes en 2023, les effectifs ont en réalité été réduits de 2515 postes équivalents temps plein. Il s'agit de la baisse la plus importante, tout ministère confondu. À ce sujet, la Cour des comptes a rappelé l'importance des missions régaliennes fondées sur la hausse constante des effectifs pour répondre aux priorités gouvernementales.

 

 

 


Association Panthéon-Sorbonne Sécurité Défense (P1SD)

PANTHÉON-SORBONNE SÉCURITÉ-DÉFENSE

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

12 Place du Panthéon

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